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Le secteur de la formation : de la promotion sociale au retour sur investissement par Jean-Pierre Willems, Consultant en droit de la formation chez Demos.

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De la nouvelle société au changement de société (1970-1981)

Le système de formation professionnelle est né de la négociation sociale, largement encouragée au début des années 70 par l’Etat qui souhaitait promouvoir une société dans laquelle la démocratie politique et la démocratie sociale uniraient leurs efforts dans la construction du progrès économique et social.

Cet espoir a été brisé par le choc pétrolier de 1974 et la montée rapide du chômage, notamment des jeunes. La promotion sociale et l’évolution professionnelle s’effacèrent progressivement des priorités pour laisser place aux plans d’emploi des jeunes ou aux actions de reconversion qui commençaient à se développer dans les bassins industriels.
 

La décentralisation et le droit à la formation pour tous (1982-1992)

Avec l’arrivée de la gauche au pouvoir, pour la première fois la formation professionnelle est dotée d’un ministère de plein exercice, confié à Maurice Rigout, l’un des quatre ministres communistes du
Gouvernement Mauroy. Les lois Auroux en 1982 avec la réforme de la négociation collective, Deffere en 1983 qui confient la formation professionnelle aux régions dans le cadre de la décentralisation, et Rigout en 1984 sur la formation professionnelle et l’emploi des jeunes, réforment profondément l’organisation et les moyens de la formation professionnelle.

Cette action sera complétée au début du second septennat de François Mitterrand par Michel
Rocard qui met en place le Crédit formation individualisé qui doit permettre à tout un chacun, et prioritairement aux jeunes, d’acquérir une qualification professionnelle reconnue.

Les années 80 voient également l’émergence de deux acteurs nouveaux : les Conseils régionaux (Loi
Deferre de 1983 sur la décentralisation) et l’Europe (entrée de l’Espagne et du Portugal en 1986, mise en place des programmes et fonds européens pour la formation).
 

La formation, outil de gestion de l’emploi (1992-2001)

La crise économique des années 1992-1993 met un terme au droit à la formation pour tous. Le dialogue social reste en panne pendant dix ans et l’Etat, comme souvent en période difficile, reprend la main en centralisant les décisions et en faisant de la formation professionnelle un outil de gestion du marché du travail. C’est la mise en sommeil d’un système de formation professionnelle « seconde chance » qui se donne comme objectif l’accès à la qualification pour tous. Ces années marquent un coup d’arrêt pour le système de formation professionnelle continue, qui ne connaît pas d’innovation majeure. Malgré le livre blanc sur la Formation Professionnelle (2000) qui devait servir de base à une grande réforme pour le XXIème siècle, il faudra attendre 2002 pour qu’une véritable dynamique se réenclenche.
 

La compétence ouvre la voie au parcours professionnel (2002-2012)

A partir de 2002, le système de formation professionnelle se transforme.
La voie est ouverte par la loi du 17 janvier 2002, dite loi de modernisation sociale. En créant la
Validation des Acquis de l’Expérience (VAE), c’est-à-dire la possibilité d’obtenir une certification reconnue par l’Etat uniquement sur la base de la validation des compétences acquises dans le cadre de ses activités personnelles et/ou professionnelles, la loi met sur un pied d’égalité le travail (ou plus largement l’activité) et la formation. Dans un pays qui a souvent opposé la formation qui libère au travail qui asservit, le changement n’est pas mineur. Ce changement de paradigme, initié par le législateur puisque les partenaires sociaux n’ont pas contribué à la création de la VAE, va trouver un puissant relais dans la négociation sociale.

L’ANI du 5 décembre 2003 constitue une véritable refondation du système de formation professionnelle continue : passage de la notion de formation à celle de professionnalisation, mise en place d’outils de gestion des compétences (entretien professionnel, passeport formation, bilan de compétences, certification…) ou encore multiplication des moyens d’accès à la formation (Plan, DIF, formation hors temps de travail…) constituent autant d’évolutions qualitatives significatives.

La loi du 4 mai 2004 reprendra largement l’ANI de 2003 pour le généraliser. Elle ira même plus loin en inscrivant dans le Code du Travail un article premier qui systématise la consultation des partenaires sociaux préalablement à l’adoption d’une loi qui modifie le Code du Travail.
Ce bel ordonnancement, des partenaires sociaux créatifs et un législateur qui valide et diffuse les innovations, sera pourtant battu en brèche peu de temps après. Sous pression étatique, les partenaires sociaux engagent une nouvelle négociation qu’ils concluent rapidement par un ANI du 7 janvier 2009. La loi du 24 novembre 2009 reprendra cet accord mais y ajoutera la réforme des OPCA.
Cette réforme sera conduite par l’administration avec la volonté de reprendre la main sur la totalité de la gouvernance du système de formation professionnelle. Centralisation, dirigisme, étatisation, autoritarisme, marqueront donc les positions de l’Etat et ses relations avec les partenaires sociaux.
 

2012 et après ? L’introuvable gouvernance de la formation professionnelle

La réforme introduite par la loi de 2009 n’aura pas permis de clarifier la gouvernance du système de formation professionnelle. Entre l’Etat, les conseils régionaux et les partenaires sociaux, les rapports demeurent plus conflictuels que collaboratifs. Si des actions communes sont conduites, des rapports de force subsistent et le rôle de chacun n’est pas clairement arrêté.

Ces relations difficiles contrastent avec des évolutions très rapides des pratiques de formation, notamment sous l’influence de la diversification des modes d’accès à la connaissance. Les nouvelles technologies, les apprentissages informels, les compétences comportementales, la capacité à utiliser de manière pertinente la connaissance plutôt que la maîtrise des savoirs, autant d’évolutions qui nécessiteront une réforme continue du système de formation professionnelle.

Après 40 ans de fonctionnement du système de formation professionnelle, force est de constater que la gouvernance du système demeure mal établie. Trois acteurs principaux se débattent dans des luttes de prééminence et de territoire davantage qu’ils n’établissent de coopérations fructueuses, et les instances de régulation peinent à jouer leur rôle. Il y aurait urgence à ce que la formation professionnelle continue ne soit pas le champ de théâtre d’un conflit de légitimités de nature différente certes, mais dont aucune n’est contestable et entre lesquelles il devrait moins s’agir d’établir une hiérarchie que de créer les conditions d’une action commune efficace.

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